Pour décrocher son crédit :
Il faut gagner plus de 3700 euros par mois pour décrocher un crédit immobilier
Pour compenser l’envolée des taux de crédit, les profils retenus gagnent 30% de plus qu’il y a 20 mois. Et dans le même temps, la capacité d’emprunt des ménages s’est effondrée.
Pour décrocher un crédit, il faut être de plus en plus riche. En janvier 2022, vous deviez gagner 2840 euros nets par mois pour un prêt de 200.000 euros sur 20 ans. Aujourd’hui, votre revenu ou celui du ménage doit dépasser les 3700 euros (3720 euros exactement) par mois - c’est 1200 euros de plus que le revenu médian en France -, soit une hausse de 31% en 20 mois, selon une étude de Meilleurtaux, courtier en crédit immobilier. Pas sûr que beaucoup de salariés aient obtenu une telle augmentation en moins de deux ans. Ajoutez à cela des prix qui baissent mais pas du tout de 31%.
Cette hausse de revenus est d’autant plus nécessaire que la capacité d’emprunt des ménages a fondu comme neige au soleil, à cause du quadruplement des taux de crédit (de 1,2% à 4,3%): 215.000 euros aujourd’hui contre 282.000 en janvier 2022 (pour un ménage qui gagne 4000 euros par mois). Et plus vous êtes riches, plus la dégringolade est spectaculaire: -150.000 euros pour des emprunteurs qui touchent 10.000 euros nets par mois. «Les acheteurs ne peuvent pas suivre et les vendeurs ne sont pas prêts à baisser leur prix ou tout simplement à emprunter de nouveau pour subir l’envolée des taux», analyse Maël Bernier, de Meilleurtaux.
Du côté des banques, elles sont plus nombreuses à accorder des prêts et à faire des efforts. Côté taux, les négociations peuvent aboutir à des baisses de 0,3% en moyenne entre les taux affichés et ceux réellement obtenus. Mais, en échange, les établissements financiers exigent des contreparties. «Elles sont notamment strictes sur l’épargne après opération qui doit avoisiner les 30% des revenus pour les bons dossiers», souligne l’experte en courtage. Et cette exigence se voit dans les chiffres: quatre demandes de crédit immobilier sur dix ont peu ou pas de chances d’être acceptée. Car le taux d’endettement des emprunteurs, limité à 35% des revenus disponibles, est trop élevé.
À quand la baisse des taux de crédit?
Pour environ 9% des dossiers qui sont finançables, les futurs acheteurs affichent un taux d’endettement supérieur à 40%. Ils n’étaient que 5% en juin. Eux peuvent faire une croix sur leur crédit immobilier. Les autres (plus de 31%), dont le taux d’endettement est compris entre 35% et 40%, ont encore une chance d’obtenir un prêt. Car les banques peuvent déroger à la «règle des 35%» mais pour seulement 20% de dossiers. «Ces dérogations sont ingérables et trop complexes, résume Maël Bernier, de Meilleurtaux. Par ailleurs, les banques sont tellement contrôlées qu’elles redoutent d’utiliser cette poche dérogatoire.» Conséquence: des profils inattendus ont vu leur demande de prêt rejetée. C’est le cas d’un couple sans enfant, qui envisageait d’acheter un appartement à Paris à 770.00 euros (frais de notaire inclus) pour ensuite le louer. Pour le financer, ils ont demandé un crédit de 640.000 euros sur 25 ans qui a donc été refusé. Et ce, malgré un apport de 130.000 euros, un reste à vivre de près de 7800 euros (!) par mois et un taux d’endettement de 39%.
Reste à savoir combien de temps cette situation va durer. «Les taux devraient atteindre un plafond à 4,5% (hors assurance) d’ici la fin de l’année et se stabiliser pendant plusieurs mois, estime Maël Bernier. Pour la baisse, il faudra voir comment l’inflation évolue. Mais ce qui est sûr, c’est que l’ambition est là du côté des banques pour 2024.»